Un an plus tard, Cal avait été surentraîné, son corps avait été poussé à bout des centaines de fois, il avait repoussé ses limites et craché du sang toutes les nuits pendant des semaines. Mais il était prêt, en tout cas c'était ce qu'elle disait.
- Ta forme animale a tellement grandit, on a du mal à croire que tu n'es qu'un gamin de dix ans en te voyant ...
La main de la femme brisée se posa sur une grande tête noire et des yeux dorés et sauvages se posèrent sur elle. Voilà donc qu'elle était fière de lui. Devait-il se sentir heureux ? Peut-être pas, et pourtant, cela lui permit de tenir le coup.
- Ne le laisse pas s'enfuir cette fois !
Dans sa chaise roulante, la jeune femme aux cheveux d'argent leva une main en direction des fuyards. Ses yeux exorbités témoignaient de sa folie, pour elle, la vie des autres n'avaient plus d'importance, elles ne faisaient qu'alimenter sa haine. Cal, en fidèle instrument de cette vengeance aveugle, rattrapa les deux jeunes en fuite. Ils n'étaient même pas mange-morts, seulement victime des soupçons déments d'une femme malade, mais le jeune garçon n'en avait que faire, il devait obéir. Il tua le garçon mais lorsqu'il plaqua la fille au sol et qu'elle planta des yeux verts effrayés dans les siens, il eut comme un choc. Ces yeux, ce sentiment, il le reconnaissait. Douleur, peine, peur, effroi, ... Tant de choses qui étaient passées dans ses yeux à lui et que personne n'avait vu. Comme il aurait aimé que sa mère puisse se rendre compte alors que ce qu'elle faisait de lui était mal ...
Il lâcha sa proie et la regarda s'enfuir. Quant il revint vers sa mère assise sur son trône de métal et d'ivoire, il garda la tête basse, honteux d'avoir trahi sa seule famille.
Elle lui lança un regard angoissé depuis le quai et Cal se souvint de ces derniers mots à son égard :
- Reviens très vite, je mourrais sans toi !
Il ne voulait pas qu'elle meurt, il ne fallait pas que sa mère meurt à cause de lui ... Elle était tout ce qu'il avait. Il devait aller à Hogwarts, mais il ne perdait pas de vue l'objectif qu'elle lui avait donné. Il savait pourquoi il avait été entraîné, il savait qu'il reviendrait toujours vers elle.
C'était un matin, un matin des vacances de Noël, un matin neigeux. Ses cheveux flottaient sur un océan blanc et ses yeux verts lui semblaient toujours aussi magnifiques. Il allait sur sa troisième année à Hogwarts, et au contact des autres jeunes, au contact de cette jeune fille, il avait réapprit ce qu'était vraiment la bien et le mal. Il avait apprit qu'il était mal de tuer, même pour une personne qu'on aime, il avait apprit que tout ce qu'avait sa mère jusqu'à présent était mal. Et il commença peu à peu à lui tourner le dos, jusqu'à ne plus revenir à la maison pendant les vacances. Il avait beau savoir qu'elle était malade, que ce n'était pas sa faute, il ne voulait plus y retourner, il ne voulait plus faire de mal à personne.
- Tu m'as trahi ! J'ai dû faire tout le travail moi même !
Les mains de la jeune femme triturèrent son visage déjà ravagé par les larmes et la démence.
- Je pensais que je pouvais compter sur toi !
Ses hurlements, ses gémissements, s'en était trop pour Cal :
- Qu'est ce que tu attends de moi maman ?
- Tue le ! Maintenant que je l'ai enfin trouvé, tue-le ! Fais au moins ça pour moi ! Après, je ne veux plus jamais te revoir !
Cal se retourna vers la chaise où était assis un sorcier, un sac en toile autour du visage. Le mange-mort qui avait tué son père. Cal se transforma une dernière fois et prit son élan avant de bondir sur cet homme qui était à l'origine de tout.
Ce fut vite terminé, mais au lieu de se sentir libéré, Cal se sentit sale. Encore plus sale lorsque les épaules de ce corps sans vie reprirent leur véritable forme frêle et que de longs cheveux bruns s'échappèrent du sac en toile. La vie avait quitté sa victime, le maléfice de la folle révélait enfin tout le stratagème. Il retira le sac et perdit son âme ... Ses yeux verts ... Même éteints ils étaient toujours aussi magnifiques.
Un rugissement transperça la nuit, une ombre noire se précipita sur la reine démente. Il ne contrôlait plus, il n'était plus que rage et colère, il était aussi fou qu'elle.
Quand il reprit ses esprits, elle gisait elle aussi devant lui. Il était libre, le monde était libéré, mais il n'avait jamais été aussi seul et malheureux.